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Michel van Schendel († 1929-2005)
Journaliste et écrivain,
professeur de littérature française et québécoise à l’UQAM
“L’amour dans la littérature
canadienne-française”.
Un article publié dans la revue Recherches sociographiques, vol. 5, no 1-2, janvier-août 1964, pp. 153-165. Québec : département de sociologie et d'anthropologie de l'Université Laval. Presses de l'Université Laval. Numéro intitulé : “Littérature et société canadiennes-françaises.”
Posons un premier jalon. L'amour, le sens de l'amour est le carrefour des tentations et des accomplissements d'une culture. Sur le plan littéraire, il en est en tout cas l'expression la plus simple et la plus complète. Car les éléments qui font ou défont le couple résolvent dans une synthèse étonnante les conflits biologiques, affectifs et sociaux qui déterminent le jeu des relations individuelles. À la recherche d'une image globale, mais définie de l'existence, qu'elle s'efforce chaque fois de découvrir, d« inventer » au sens littéral du mot, la littérature a toujours chargé l'amour d'épouser ou au contraire de tromper le moment de l'histoire qu'elle avait pour fonction latente de représenter à la conscience. L'amour devient ainsi le point de convergence de l'existence sociale et de la littérature. Je vois à cela une raison majeure. C'est que l'union amoureuse n'est pas suffisamment caractérisée si on n'y voit que la symbiose momentanée des tendances psychologiques, des appétits affectifs et des déterminations sociales particulières. Du désir à l'accouplement puis à la rupture, la relation du mâle et de la femelle est aussi un mouvement dont l'intensité passe pour exemplaire aux yeux du littérateur. Associant fidèlement l'amour et l'Eros, il donne à ce mouvement une signification concrète en même temps qu'abstraite qui élève celui-ci au niveau de l'histoire. La dialectique physique de l'union amoureuse reproduit, tout en le transformant, le mouvement global des événements.
L'amour est ainsi le plus grand mythe littéraire. Comme sujet d'invention entre les mains de l’écrivain, il exprime la synthèse des relations individuelles et sociales, il incarne le rapport de la littérature et de la société. L'un des premiers soucis de toute littérature, qu'elle soit écrite ou orale, mythologique et religieuse ou réaliste et laïque, est de chercher ce rapport. Pour Maurice Blanchot, le Chant des Sirènes, le chant mystérieusement érotique du désir et du danger, révèle le sens profond de l'acte d'écrire. [1]
La littérature est une disponibilité à l'incarnation. Elle est donc, entre autres choses, une disponibilité à l'Éros. Cela est essentiel et il n'existe [154] pas de grande littérature qui n'ait accepté de s'y laisser aller, bien que parfois de façon allusive. Le dieu Çiva de la Pagode noire tient en main, pour la magnificence du rite, un quadruple phallus. Les mâles de Grèce et de Troie s'entredéchirent pour la possession d'Hélène. Ulysse met la ruse au service de sa frayeur masculine pour s'approcher des Sirènes. Les jeux dionysiaques, avant d'être des concours dramatiques, rappellent la légende des femmes en rut se lançant à la poursuite des taureaux qu'elles vont lacérer. Les Aztèques célèbrent l'oiseau-serpent, Queizalcoatl, métamorphose de la fécondité. Les Esquimaux chantent la jeune fille changée en phoque qui attire le pêcheur au fond de l'eau. Guillaume au nez courbe, revenant de la guerre contre les Sarrasins, jouit de la « possession tranquille » de sa femme et de son fief. Le chevalier-troubadour de la poésie occitane écrit des poèmes dans la prison qui le prive de la vue de sa suzeraine. Le plus beau chant d'amour de la littérature mondiale est à mes yeux le Cantique des Cantiques où la chair désirée de l'épouse est le lieu d'une alliance avec un dieu mâle régnant sur le désert.
Les grands actes de la littérature mondiale ont fait de l'amour charnel ou de sa recherche l'image mythique où viennent confluer les appétits et les dangers de l'existence, les conflits sociaux à travers l'exercice même de l'amour. Cet amour est d'abord charnel et, en l'acceptant pour ce qu'il est, la littérature parvient à donner une représentation crédible de son désir de transformation.
Cela devient d'une évidente clarté à la naissance de la littérature romanesque proprement dite. Le roman français moderne naît au XVIIIe siècle, après les mémoires et correspondances qui ont eu une vertu initiatique. La vie de Marianne de Marivaux puis La religieuse de Diderot sont de très grandes dates, car ces œuvres sont offertes lorsque des structures sociales sur le point de se rompre font paraître dérisoire l'anonymat traditionnel des fonctions. L'individu apparaît comme un être porteur de revendications ; il a droit à sa vie quotidienne et celle-ci a besoin d'être nommée. Le roman n'est autre chose, à ce stade et pour plus de cent ans, que la reconnaissance des droits de la vie quotidienne, et le personnage de roman, débarrassé des mythologies totalisantes qui ont permis son épanouissement mais qui faisaient de lui un agrégat symbolique de nombreuses fonctions sociales, cesse d'être Pantagruel ou Don Quichotte pour devenir l'être en chair et en os qui marche dans la boue, d'une façon et avec un style qui lui appartiennent en propre. Or, la seule psychologie, la seule lumière dont le roman éclaire les droits de la vie quotidienne individualisée est celle de l'amour. Il en fait le signe d'une protestation, d'un déclassement salutaire, d'un ratage social qui désigne la corruption des structures. [2] Au XVIIIe siècle, cet amour ne peut être que libre et de la connivence de cette liberté [155] avec ce qu'il est convenu d'appeler « l'amour-libre » découle toute une littérature cherchant à justifier par les raffinements de la curiosité érotique le libertinage de la pensée, l'individualisme du penseur.
Mais ce n'est très évidemment pas de la littérature mondiale que je veux vous entretenir. Je n'ai esquissé cette hypothèse sur les fonctions de l'amour dans la geste mythique de l'histoire qu'afin de mieux cerner l'absence relative du thème amoureux dans la littérature canadienne-française ou, du moins, les raisons de son échec.
Cette absence, cet échec, un siècle de tentatives l'atteste. Depuis le premier roman écrit et publié par un Canadien français. Depuis 1837, très précisément et très significativement. Cette année-là, en effet, l'année même où l'écrasement de la révolte présage un alourdissement singulier du passif québécois dans les domaines importants, un petit roman paraît. Il a pour auteur le fils de Philippe Aubert de Gaspé et porte un titre séduisant : L'influence d’un livre ou Le chercheur de trésor. La littérature est une chasse au trésor dans laquelle le jeune écrivain se lance avec passion. Dans la préface de l'ouvrage, il avertit ainsi les futurs romanciers de son pays :
- « Les romanciers du dix-neuvième siècle ne font plus consister le mérite d'un roman en belles phrases fleuries ou en incidents multipliés ; c'est la nature humaine qu'il faut exploiter pour ce siècle positif, qui ne veut plus se contenter de Bucoliques, de tête-à-tête sous l'ormeau, ou de promenades solitaires dans les bosquets. Ces galanteries pouvaient amuser les cours oisives de Louis XIV ou de Louis XV ; maintenant, c'est le cœur humain qu'il faut développer à notre âge industriel. La pensée ! voilà son livre.
-
- « Il y a quelques années, j'avais jeté sur le papier le plan d'un ouvrage où, après avoir fait passer mon héros par toutes les tribulations d'un amour contrarié, je terminais en le rendant heureux le reste de ses jours. Je croyais bien faire ; mais je me suis aperçu que je ne faisais que reproduire de vieilles idées, et des sensations qui nous sont toutes connues. J'ai détruit mon manuscrit et j'ai cru voir un champ plus utile s'ouvrir devant moi. » [3]
Cœur humain, âge industriel, souci de la réalité considérée comme le haut-lieu de la littérature romanesque - et tant pis si cette réalité n'est pas douce à dire -, désir de faire neuf. Dans ces quelques lignes il y avait tout un programme. Mais le jeune romancier n'eut pas le temps de donner vie à ses audaces. Il mourut à l'âge de 26 ans, en 1841, après n'avoir donné qu’un seul petit roman, moins intéressant que la préface qui le présentait. Le thème de ce livre était pourtant suggestif. Un diable habillé en coureur des bois venait, la nuit, inviter à la danse une fille dont il chahutait le cœur et les idées morales. L'exploration de ce vieux thème eût dû être émoustillante pour des générations de diables québécois. Mais le jeune homme, se rappelant peut-être qu'il était le fils de Philippe de Gaspé, se résigna à la bonhomie. Un signe de croix eut raison de toutes les tentations de vérité [156] et le diable lui-même, bon garçon, n'osa pas être don Juan. Il en paya le prix en se condamnant au folklore. - Papineau, lui non plus, n'a pas osé aller jusqu'au bout. - Au premier jour de notre conscience, le premier regard est un immense désir mais s'abaisse déjà sur un premier échec.
Le sillon était tracé. Il fut difficile, par la suite, de le quitter. Au contraire, on ne put faire autrement que de l'approfondir et la peur de l'amour conduisit à la négation du roman. Seize ans plus tard, en 1853, P.-J.-O. Chauveau, futur premier ministre, nourrit encore, il est vrai, des intentions explicitement romanesques lorsqu'il publie son Charles Guérin. Mais la signification polémique du roman l'emporte nettement. Les idées de Chauveau sur la corruption du régime seigneurial, sur l'exploitation marchande, sur les antagonismes sociaux et nationaux du Bas-Canada sont d'ailleurs des plus intéressantes et forment un jalon indispensable de la conscience politique. On ne peut en dire autant de l'aspect littéraire du roman. La représentation de l'amour, chez Chauveau, n'est pas primitive. Si elle l'avait été, elle aurait été plus juste. Elle est extraordinairement timorée. Son personnage féminin est une jeune fille. C'est plus précisément la jeune fille, évidemment effacée, évidemment « bonne », c'est-à-dire tranquille et désespérément patiente, évidemment appelée au sacrifice de sa vie de femme.
Un faux universalisme, simplificateur par commodité et paresse, aimerait sans doute imputer au moralisme des débuts de la civilisation bourgeoise l'anémie bien-pensante à laquelle les premiers littérateurs canadiens-français contraignaient les figures qui eussent dû être les plus inquiétantes de leurs créations. Certes, les idées bourgeoises du XIXe siècle, que les notaires québécois importaient abondamment de France, expliquent en partie cette sous-alimentation de la femme, dans l'ordre de l'existence. Mais elles n'occasionnent certainement pas celle du personnage féminin, dans l'ordre de la littérature. Au contraire, en tant que désignation contradictoire mais, par sa contradiction même, exemplaire de la civilisation bourgeoise triomphante, la littérature romantique achève de reconnaître l'égalité héroïque d'Armance, de Mathilde de la Mole et même d'Eugénie Grandet par rapport à leurs maîtres masculins, amants ou pères. [4]
Dans le domaine du roman, le XIXe siècle québécois apparaît comme une entreprise de destruction hâtive de ce que l'on pourrait construire. Au cours des années 70, paraît le fameux Jean Rivard d'Antoine Gérin-Lajoie. Dans sa préface, l'auteur se défend bien d'avoir voulu « faire un roman ». Il poursuit des fins évangéliques et politiques qui ont eu en particulier pour effet de reléguer la femme du colon Jean Rivard dans l'anonymat du Bien, c'est-à-dire dans la maternité et à la cuisine. Cette femme n'existe pas, j'ai même oublié le nom d'emprunt qui lui est donné. Dans la mesure où [157] un roman est obligé de prendre appui sur un personnage féminin, le livre de Gérin-Lajoie n'existe pas davantage. Au fond, l'auteur avait raison d'écrire qu'il ne faisait pas un roman.
Beaucoup plus tard, chez Laure Conan, apparaît déjà la frustration qu’engendre la dénégation littéraire (et sociale) des droits de la femme. Mais si le personnage féminin a ici une certaine existence, il n'en a qu'en restant le négatif de lui-même, un être dépouillé, gris, incapable de plaisir et d'amour. Il est vrai de dire, cependant, qu'en abordant à Laure Conan nous abordons à un chapitre différent de l'histoire de la littérature au Canada français, celui d'un début de remontée, d'une prise de conscience encore voilée. Il a fallu que le côté larvaire de notre existence nous prît à la gorge pour qu'il fût possible, à même le dessaisissement, d'œuvrer vers une ressaisie.
C'est plutôt d'une saisie qu'il faudrait parler. Quels sont en effet les éléments auxquels s'applique historiquement la difficile prise de conscience de la littérature québécoise ?
Au départ, ce fut la peur, le sens vertigineux du vide, le non-avenir, le refoulement progressif opéré par la colonisation qui trouva dans la survivance des seigneuries un alibi commode. On désira s'en protéger, c'était naturel. Il y eut donc les rêveries bucoliques, l'amour de la chaumière au bord d'un fleuve qui la gifle, la peur des villes. La peur de ce que, prudemment, on appelle la civilisation urbaine mais qui, année après année, se nommait ici : rades, sirènes, quarantaine des navires avec leur cargaison de choléra, pourrissement du ciel, grouillement de peuple, bigarrure des croyances et immigration, trafic d’alcool, travail d'enfants, fumée... vie moderne peu à peu. Il y eut, très exactement, la peur de l'amour. C'est-à-dire la peur d'espérer posséder ce qui - l'existence collective l'enseignait - ne pouvait être possédé.
Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que, pendant plus de vingt ans, vers la moitié du siècle dernier, la plupart des ouvrages de fiction fussent publiés sans nom d'auteur. Les écrivains québécois ne voulaient surtout pas qu'on les prît pour des écrivains. La mentalité du pauvre honteux entre par la petite porte de la littérature.
Cela ne va pas sans certaines explications. Un éditeur, G.-H. Cherrier, écrit en 1853 que le milieu n'est pas propice à la réception d'œuvres littéraires. À quelques lignes près, son texte pourrait avoir été écrit il y a cinq ans :
- « Il ne faut pas s'étonner si, malgré le nombre considérable de Canadiens qui cultivent les lettres, très peu d'entre eux aient voulu risquer la publication d'un ou de plusieurs volumes. On se borne généralement à quelques œuvres éphémères jetées dans le tourbillon de la presse politique et destinées à l'oubli, aussi prompt que durable, qui saisit sur le fait la plupart des diatribes dont nos gazettes sont remplies. Le recueil qu'a publié dernièrement M. Huston sous le nom de Répertoire national, et qui a exhumé un bon nombre de productions de ce genre, fait voir que l'inspiration et le génie n'ont pas toujours [158] manqué à nos écrivains français. Le temps et les moyens de mettre leur talent à profit leur ont fait défaut : mille autres occupations plus profitables, en ce qu’elles rapportaient plus d'argent et même beaucoup plus de considération, ont limité chez la plupart d'entre eux les travaux de leur imagination à une très petite partie de leur existence. » [5]
La littérature était donc peu et mal considérée. Il est vrai qu'une société établie sur des modes juridiques déjà dépassés et, par surcroît, inadaptés à ses besoins laisse peu de place au libre-arbitre de l'activité littéraire. Les Québécois vivaient en économie plus ou moins fermée. La hiérarchie ecclésiastique continuait l'esprit de l'ancienne société seigneuriale. Les mondes clos sont toujours de petits mondes, même et surtout quand il n'est pas dans leur nature de l’être. L'homme n'y est encore que le produit de sa fonction anonyme. Il n'est pas encore un individu. Quant au lecteur attentif, homme hautement individualise, il existe bien dans les couches supérieures de la société. Mais on ne lui permet pas d’être tel au vu et au su de tous. Car on lui refuse la possibilité de devenir le romancier dont très secrètement il rêve. Un romancier, est-ce autre chose qu'un lecteur attentif qui a réalisé ses désirs de création ?
Il y a pourtant un autre obstacle. Celui de la Conquête. Celui de l'occupation. La menace contre la littérature est d'abord venue de là. Le roman, entre autres choses, est une école de lucidité. Les colonisateurs ont un intérêt naturel à le savoir et à l'empêcher. Le puritanisme y trouve aussi son compte. Un journal bilingue lance l'attaque le 3 décembre 1795. À cette date, la très décente Gazette de Québec reproduit un article du Whitehall Evening Post, qui déclare :
- « L'homme sensé doit se garder de faire place dans son esprit à des idées et à des sentiments qui peuvent devenir pernicieux au dernier degré... Où sont donc les avantages des historiettes et des romans ? On dira peut-être qu'ils forment une espèce d'histoire, contenant un détail d'événements intéressants, qui ont pour but d'attirer l'attention et de former l'esprit... Mais, en réponse à cette apologie, je demanderai si l'instruction que vous recevez n'est pas mêlée de beaucoup de matières superflues et nullement profitables ? Si l’écume ne l'emporte pas dans la balance sur le vrai métal ? ... Je pense que les réponses à cette question seront dans l'affirmative. » [6]
Le malheur - mais ce malheur a continué depuis de faire partie du système - est que, du côté québécois, un esprit d'ancienne France, un classicisme orthodoxe et un moralisme aveugle aient concouru à la propagande des puritains du colonialisme. La soumission s'est inscrite dans les faits, quelles qu'aient été les intentions. De la littérature à la politique, les destinées furent parallèles. Bien entendu, il ne faudrait pas considérer le Québec comme un phénomène à part. Les accusations lancées en Grande-Bretagne [159] contre Byron et Shelley, l'idéologie propre à la Restauration en France, plus tard les attaques d'un Louis Veuillot et la condamnation judiciaire des Fleurs du mal dérivaient d'une même psychose et d'une même peur. Ici, le pays n'était qu'une chose démantelée, un vide attirant le vide, où l'intimidation avait plus de chance de porter fruit.
Mais les raisons pour lesquelles le roman attirait la méfiance ne s'arrêtent pas là. Il est bon de rappeler la concurrence qu'offrait la qualité de la production littéraire française. Cette concurrence, à certains égards, était désespérante pour les écrivains consciencieux d'ici. Au lieu de les stimuler, elle ne faisait que leur donner la mesure d'un immense écart entre leur isolement et les conditions historiques de l'épanouissement français. Cette perspective n'était pas juste sans doute. D'autres pays, culturellement solitaires, ont réglé le problème de leur expression littéraire en acceptant cette solitude et en en faisant une source de création. Mais, contrairement à ce qu’enseignent certains clichés, les Canadiens français du XIXe siècle n'étaient pas des Robinsons de la culture. Les lettres québécoises tenaient de très près au courant des œuvres nouvelles en France et de la transformation des idées. Le seul problème, très réel, était qu'en haut lieu on ne tenait pas à le reconnaître. On n'acceptait pas que circulât en dehors d'un milieu restreint, n'importe quelle idée. Le lettré québécois n'était pas un isolé culturel mais, déjà, un monstre au milieu de son peuple.
Par la suite, il accepta de se ranger. Il fit le compte de ses idées, il en retrancha et il présenta un bilan incomplet, à sens unique. Il lui fallait de la sécurité. Il lui fallait aussi devenir un romancier, parler aux gens, tenter de combler le fossé. Le tragique est que, de cette manière, il ne l'a jamais comblé.
Cette longue digression historique me mène droit au fond de l'affaire. La littérature québécoise n'est pas marquée d'une tache morale indélébile, signe d'une responsabilité univoque. Ce n'est pas avant tout la faute des anciens romanichelles du roman au Canada français, si pendant tout un siècle ils n'ont pu ni exorciser l'amour, ni écrire de romans. Anne Hébert écrit au début du Torrent : « J'étais un enfant dépossédé du monde ». [7] Nous touchons ici au véritable drame.
Le sentiment de la dépossession n'est pas en soi un obstacle à la création. Il est même plutôt un stimulant, car il provoque un besoin de compensation. Mais ce stimulant n'agit que si la dépossession n'affecte pas les moyens grâce auxquels une compensation créatrice peut être trouvée. Or, l'un des aspects les plus sordides de la colonisation du Québec fut justement que l'on fit main basse sur les instruments intellectuels qui sont indispensables à la création. Je ne veux point parler seulement de la langue, laissée à l'abandon. Ce délaissement, ce rationnement de l'air ambiant n'est lui-même [160] qu'un effet de l'action générale du système qui a procédé, dans tous les domaines et à tous les paliers, au cloisonnement, à la mise en réserve du Québec. Cela a signifié une intervention particulièrement débilitante au niveau des traditions.
Une culture n'existe pas, une littérature n'a pas de cohésion et toute expression d'amour, point de convergence de l'existence sociale et de la littérature, en est bannie si cette culture ne permet pas de véhiculer un sentiment d'appartenance et si, à la source même de l'acte d'écrire, un monde clos, étroitement colonisé, empêche la transmission des traditions les plus fécondes.
C'est l'aliénation essentielle, la malédiction initiale. Il est remarquable qu'aucune littérature n'en a autant souffert que la littérature canadienne-française. Tout au long de son histoire jusqu'à une époque toute récente, celle-ci est restée doublement étrangère à elle-même : en tant que domaine réservé dans une province considérée elle aussi comme un domaine réservé, c'est-à-dire en tant qu'expression appauvrie d'une tradition amputée de ses éléments créateurs, mais également en tant qu'il n'existe pas de référence à une tradition antécoloniale pleinement autonome. Au moment de la Conquête, la culture française des Canadiens français n'est pas développée ; en un sens, elle leur est même étrangère. Car elle leur passe par-dessus la tête. Dans la mesure où s'écrit alors une littérature (Mère Marie de l'Incarnation, baron de La Hontan), les contradictions, les antagonismes de celle-ci reflètent les débats d'idées des couches supérieures de la société française métropolitaine.
La rencontre de ces deux facteurs a produit la singulière et triste originalité de la littérature canadienne-française. Aucun pays colonisé ne s'est trouvé dans le même cas. Ni l'Inde, ni la Chine, ni les pays arabes, ni l'Afrique noire, ni même l'Amérique latine où la culture importée des créoles a pu être digérée. Dans toutes ces contrées, bien que la colonisation ait eu pour effet de morceler, de cloisonner, d'immobiliser la tradition, celle-ci était suffisamment homogène et cohérente pour qu'il fût possible d'y recourir au moment d'entreprendre les grandes luttes politiques et culturelles d'émancipation.
La singularité du Canada français est illustrée par le fait que la seule tradition à laquelle il est possible de se référer est celle-là même qu'a engendrée la colonisation, c'est-à-dire un produit dont la composition reproduit tout à la fois les luttes incomplètes pour la « survivance » et les cloisonnements étanches entre générations et entre catégories sociales, ou entre régions, que le système a imposés à l'existence nationale des Canadiens français. Il n'est possible de se référer qu'à cette tradition-là, parce qu’avant son intervention, avant la Conquête, avant que se fussent écoulées plusieurs décennies depuis la Conquête, il n'existait pas telle chose que l'on pût appeler la nation canadienne-française. Ce n'est rien d'autre que le [161] système qui a formé cette nation. C'est le peuplement, c'est l'exploitation, ce sont les luttes qui lui ont donné une relative identité.
Telle quelle, la toute neuve tradition nationale n'interdisait pas que des écrivains y recourussent pour y puiser les éléments d'une littérature originale. Au sens de la dépossession s'ajoutait normalement celui de la lutte. Mais il aurait fallu pouvoir mesurer les dimensions exactes de cette lutte, de ces luttes, en dégager tout à la fois la continuité et les valeurs de progrès, exercer librement un choix et, d'âge en âge, approfondir les antécédents qui, de 1837 à l'Institut canadien, définissaient, au rebours de la ligne officielle, une conduite ouverte mais résolue. Pour y arriver, il aurait donc fallu maintenir le contact entre les générations. C'est un tel contact qui est nécessaire, notamment à la littérature. Au lieu de cela, les autorités spirituelles et civiles du système coupèrent le courant. Et, tandis qu'elles filtraient la tradition pour n'en retenir que la mort, elles dosèrent dans le cœur de leurs opposants le vertige des recommencements, le sentiment insupportable que, d'une génération à l'autre, tout était à recommencer Jusqu’à ce que l'action devint futile, la création inexacte.
Il en est résulté très tôt une inadéquation presque absolue des désirs à la réalité, soit, au plan de l'écriture, de l'ambition d'inventer un monde nouveau qui ait une consistance romanesque à la possibilité concrète de l'exprimer. Cette inadéquation a servi de carte d'identité, de statut permanent à la littérature canadienne-française. Seule la poésie, à intervalles réguliers depuis le début du XXe siècle, a pu s’en affranchir. Car elle est apparue ici comme un mode allusif et détourné d'expression, susceptible de traduire directement la relation essentiellement schizophrénique que le créateur a entretenue avec la réalité. C'est paradoxalement ce qui permet aujourd'hui à la poésie de Gaston Miron, de Paul-Marie Lapointe, de Paul Chamberland d'accuser dans l'intimité explosive du langage l'aliénation de la société québécoise et, vengeresse, de retourner cette aliénation contre elle-même pour y découvrir les armes d'un combat. [8]
Quant à la littérature romanesque, elle s'est trouvée longtemps condamnée. Car elle était aux prises avec une contradiction insoluble. Elle était chargée d'exprimer une réalité terriblement allusive et fuyante, proprement insaisissable, dans un langage que l'on voulait presque simpliste, hostile à toute innovation formelle. Cette peur du langage recoupe la peur de l'amour. Elle a la même épaisseur. Elle a la même source. Il n'est pas possible de parler quand on est dépossédé de sa langue, de sa culture. Il n'est pas possible de parler avec une langue violée pour désigner ce qu’une [162] sorte de malédiction paraît éloigner indéfiniment de vous. Il n'est pas possible de parler de l'amour, quand l'amour devient le sens intime d'une réalité dont chacun, quant a soi et collectivement, est aliéné.
Tout cela se tient. Comme aussi est psychologiquement cohérent le fait que la conséquence, immédiatement sensible, devient plus inquiétante que la cause, tellement distante, tellement aliénante qu'on l'a oubliée. L'on prend peur du moi plus que de la chose. Ainsi s'explique que, des Demi-civilisés de Jean-Charles Harvey à La fin des songes de Robert Élie, ce qui tenait lieu de tradition littéraire se soit trouvé confirmé. Elle s'est fait une âme neuve, dans l'inquiétude, dans l'angoisse même (voir Robert Élie), mais elle n'a pas fait peau neuve. Les mois continuent de circuler maladroitement sur des rêves inexprimés. Dans son livre qu'il désigne maladroitement du mot roman pour faire oublier qu'il s'agit d'un pamphlet, Jean-Charles Harvey écrit :
- « On sait que la littérature de ce pays n'a jamais admis, dans ses livres, l'existence de l'amour ou d'une grande passion. Les divers essais publiés jusque-là se bornaient à une plate sentimentalité. » [9]
Mais quand, à son tour, il se met à parler de l'amour et de la femme, voici un chapelet de roses séchées par un siècle de sentiments craintifs :
- « (Elle) leva sur moi son grand regard ... »
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- « Dorothée marchait au milieu, parlant lentement, d'une voix musicale et prenante ... »
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- « (Elle) passait à cheval. Elle vint droit à moi, souriante, divine. Le vent agitait la crinière souple de la bête et la chevelure noire de la femme, et c’était fort joli. » [10]
Loin du joli, de l'innocent, il faudra dépuceler le mot, lui apprendre à se tenir comme un homme. C'est ce que vont faire, chacun sur une voie différente, des romanciers comme Langevin et Gabrielle Roy. Ils sont aussi les premiers romanciers qui aient réussi à rendre l'amour sensible. Mais il est significatif qu'ils ne parviennent à naturaliser le langage et à donner droit de cité au personnage féminin qu'en accusant l'infinie distance qui sépare l'amour de sa fécondité.
Si l'on pense à l'histoire du Canada français, si l'on pense à l'amour comme lieu mythique de l'histoire du roman, si l'on pense au rôle malade de la tradition, si l'on pense à la dépossession, je ne connais de texte plus saisissant dans aucun roman québécois que ce passage extrait du Temps des hommes d'André Langevin :
- « Il avait une large entaille au sommet de la tête. Marthe étanchait le sang avec des linges mouillés que lui apportait Yolande. Délicatement elle séparait les cheveux, puis elle appliquait le linge. Elle était émue. C'était la première fois qu'il la laissait le [163] toucher. Avec une infinie douceur, un soin quasi solennel, elle s'efforçait d’exprimer dans ce simple geste d’étancher, un amour qui ne s’était jamais nourri que de miettes. Elle était heureuse qu'il ne pût voir son visage. Rien ne la pouvait contraindre ainsi dans l'expression de son amour. Elle eut la tentation d’appuyer sa tête contre sa poitrine sous le prétexte de mieux voir la blessure, mais elle n'osa pas. Tout ce qu'elle avait désiré lui dire pendant ces dix ans et qu'elle ne lui avait jamais dit, tout ce qu'elle avait voulu faire pour lui et qu'elle n'avait jamais fait, tout ce qu'elle avait voulu lui demander et qu’elle ne lui avait jamais demandé, tout cela passait de son cœur à ses doigts, coulait dans ses bras comme un sang chaud. Elle écartait les cheveux et elle étanchait méthodiquement, lentement, sans même regarder ce qu'elle faisait car, la tête très droite, elle fixait le mur devant elle, elle contemplait la satiété de son bonheur. » [11]
Un signe de la maturité de romanciers comme Langevin, c'est la présence vivante, ramifiante, énigmatique de la femme. Jean-Charles Harvey en en était incapable. Il s'y efforçait pourtant. Il se donnait même un peu de cœur au ventre pour parler de sujets généralement prohibés. Mais, précisément, il ne faisait qu'en parler, et la femme n'était qu'un être mort-né enseveli dans des paroles douceâtres. Chez d'autres comme Ringuet la femme existait bien, mais dans l'ombre patriarcale, sans jamais franchir un silence ou la reléguait un ordre traditionnel. De plus jeunes romanciers lui réservèrent un rôle important. Mais Robert Élie la rend sèche d'émotions, intelligente, torturée et abstraite, elle aussi dans le prolongement de l'homme qui n'aime d'elle que la réplique de son drame. Comme si un égocentrisme de petit adolescent et le repliement sur soi devaient prémunir des violences de l'histoire, tièdement claquemurée. Tandis qu'on ne peut comprendre les romans de Langevin sans l'intervention du personnage féminin. Elle est le principe unificateur. Elle est douce, ou dangereuse, ou libre, et toujours inquiétante de cette humanité ou, sensuellement, le récit s'épuise en elle.
Nous avons ici le secret de la réussite en même temps que des limites du jeune roman au Canada français. Car, enfin, Marthe n'ose reconnaître son amour que parce que l'homme qu'elle tient dans ses bras est blessé. À son tour, celui-ci, un ancien prêtre, n’accepte l'aveu silencieux qu'elle lui fait que parce qu'il sait qu'en une circonstance plus normale, moins infirme, il lui eût évité d'adoucir sa véritable infirmité d'homme interdit à l'amour.
En d'autres termes, la sensualité se libère entre deux infirmités. C'est seulement là qu'elle est autorisée à le faire. Mais c'est aussi en prenant lucidement ce risque, en connaissant exactement l'impossible étendue des limites qui lui sont imposées, que le romancier parvient enfin à capturer l'amour. L'amour, en qui déjà le désir se déplie, ne pénètre vraiment dans la littérature canadienne-française qu'à partir du moment où on le prend pour ce qu'il est : un attribut de la dépossession québécoise, une impossibilité historique.
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C'est une importante prise de conscience. Car, dès cet instant, l'impossibilité recule. La nécessité comprise est une force libérante. L’amour une première fois apprivoise comme impossibilité, peut l'être une deuxième comme objet sensible d'une poursuite. Une proie enfin possible, une bête à dépister. Ici commence un nouvel itinéraire, celui de la chair encore vierge qui rêve d'un Graal érotique, première forme d'une repossession du monde, premier symptôme littéraire de la décolonisation approchante.
Il n'est donc pas étonnant que, depuis quelques années, à mesure que progressait la conscience politique au Québec, de nouveaux apprentis romanciers parmi lesquels se glissaient de plus anciens aient tenté de comprendre le corps amoureux, ce corps que les autres littératures ont assimilé depuis plusieurs siècles. Qu'Anne Hébert ait réussi, dans Les chambres de bois, à rompre le dilemme subtilement incestueux de Michel et de Lia, qu'elle ait conduit Catherine, la femme de Michel, à un amour suffisamment animal pour n'être pas honteux, cela, venant d'Anne Hébert, est le signe de transformations considérables.
À vrai dire, dans Les chambres de bois, les choses se passent un peu comme dans un rêve qui n'est pas vrai, ou comme dans la tête d'une petite fille bientôt pubère qui a beaucoup de personnalité. C'est un beau conte de fée. J'aime les contes de fée. Et je sais qu'il faut parfois du génie pour en inventer.
Les histoires que racontent les nouveaux venus depuis cinq ans sont moins marquées de talent, mais elles sont peut-être plus vraies. En ce sens que, si la découverte du corps est à l'ordre du jour, ou de la nuit, ceux qui la font ne se sont pas débarrassés comme par magie de leur mentalité de dépossédés. Réveillés avec brusquerie, ils se mettent en chasse, l'humeur mauvaise. Leurs gestes ont une hâte fébrile et révoltée. Il leur arrive de piétiner le morceau de chair qu'ils attrapent, après avoir éprouvé du plaisir à le voir nu et mort (je songe à certaines nouvelles de Marcel Godin). D'autres fois, l'amour n'est possible et vraiment libre, mais douloureusement discret, qu'entre le frère et la sœur (Les anges dans la ville de Wilfrid Lemoyne). L'inversion est apparente dans Amadou de madame Maheu-Forcier. Le seul livre, à ma connaissance, où les apparences de la fête s'emparent de l'amour, c'est un roman qui est presque beau tant il a de gaieté à étaler ses débordements et ses maladresses, Inutile et adorable de Roger Fournier. Mais, même ici, la joie est feinte. Et, tandis que le héros fait l'amour à bride abattue avec une jolie nymphomane qui est un peu sa copine ou, mieux, son copain de jeux, il rêve de posséder une fille inaccessible avec qui il ratera son coup juste avant qu'elle ne se suicide et ne le pousse par cette destruction à la gueuserie puis à la mort.
En réalité, par conséquent, même à ce stade-ci, la relation traditionnelle du non-amour et de la dépossession, voire de la mort, continue de se manifester, quelle que soit par ailleurs la qualité des œuvres où cette relation [165] affleure. Il se dégage des livres récents une subtile inversion des rapports amoureux. Je n'ai pas à me prononcer sur ce point. Je voudrais ajouter cependant que l'inversion plus ou moins apparente dont il s'agit à une lourde signification.
On a déjà noté que le colonialisme s'accompagnait, là ou il sévissait de nombreuses formes de désorganisation sociale et de proscription mentale. On a noté le malaise, tantôt violent, tantôt apathique, qui s'emparait, devant l'amour, des éléments les plus éduqués des pays coloniaux, comme si l'amour devenait l'image insupportable non d'une union mais d'une scission profonde au cœur de leur existence. On a constaté qu'à l'approche de la décolonisation les perversions mentales et les troubles sexuels avaient tendance à se multiplier parmi les populations. On a également remarqué que la littérature de la période de décolonisation porte souvent jusqu'à la frénésie, comme une forme de conscience inexprimable autrement, les stigmates de ces malaises et de ces troubles. Je pense entre autres aux Boucs de l'écrivain algérien Driss Chraïbi. Je pense à certaines provocations sexuelles et à la forme même de la poésie d'Aime Césaire, le poète noir. En de tels instants, les littérateurs coloniaux brouillent la semence de l'homme pour exprimer la vérité désorganisée de leur pays. Mais ils la jettent aussitôt après contre le Blanc avec une puissance qui n'a d'égale que la nouvelle force historique de leur peuple.
Dans la mesure où le Québec a subi lui aussi une espèce de colonialisme [12], bien que les formes en aient été plus subtiles et comparativement bénignes, il a eu à supporter des affronts psychologiques de même nature sinon de même violence. Il a eu à souffrir, dans la partie la plus éduquée de la population, le même déracinement, source des mêmes aliénations et des mêmes désirs. Il est probable que sa littérature, ou ce qui lui sert de littérature (je parle évidemment du roman), est en train de produire des réflexes fondamentalement identiques.
Il serait intéressant d'étudier ces phénomènes de près, non plus sous la forme d'hypothèses comme je viens de le faire, mais à partir d'un examen expérimental de la littérature.
Michel VAN SCHENDEL
La Presse,
Montréal.
[1] Maurice BLANCHOT, Le livre à venir, Paris, Gallimard, 1959, 11-13.
[2] On trouve dans Henri LEFEBVRE, Diderot (Coll. Hier et aujourd'hui, Paris, Éditeurs réunis, 1949, 198 et suiv.), une excellente analyse de ce phénomène.
[3] Philippe AUBERT DE GASPÉ, L'influence d’un livre ou Le chercheur de trésor, Québec, Imprimerie de Léger Brousseau, nouvelle édition de 1878, 5-6.
[4] L'auteur prépare un article sur le thème complexe de la signification du personnage féminin dans la littérature du XIXe siècle et sur les raisons, apparemment opposées, de l'inexistence de ce personnage dans les ébauches littéraires du XIXe siècle bas-canadien.
[5] G-H. CHERRIER, préface à Charles Guérin de P.-J.-O. CHAUVEAU, Montréal, Imprimerie John Lovell, Éditeur G.-H. Cherrier, 1853, III-IV.
[6] Séraphin MARION, Lee lettres canadiennes d’autrefois, tome IV, Hull, Les Éditions L'Éclair, 1944, 14-15.
[7] Anne HÉBERT, Le torrent, Montréal, Éditions Beauchemin, 1950, 9.
[8] Nous nous sommes abstenu d'analyser le thème de l'amour dans la poésie canadienne-française bien que ce mode d'expression soit, croyons-nous, mieux accordé que le roman aux exigences actuelles de la désignation des réalités québécoises. Une sociologie de la littérature doit cependant se placer à un autre niveau d'analyse pour situer le rôle de la poésie au Canada français. Nous consacrons un article à cette question dans le premier numéro des Cahiers du Cercle juif de langue française, à paraître cette année.
[9] Jean-Charles HARVEY, Les demi-civilisés, Montréal, Les Éditions de l'Homme, 1962, 64. (1re édition : Éditions du Totem, 1934.)
[11] André LANGEVIN, Le temps des hommes, Montréal, Le Cercle du livre de France, 1956, 55.
[12] Pour la définition de cette « espèce de colonialisme », nous renvoyons le lecteur à un article que nous avons publié, sous le titre « Maladie infantile du Québec », dans la revue Parti pris, 6, mars 1964, 21-41.
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